Interview : l'analyse des microplastiques par la Fondation Bordeaux Université

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Bienvenue dans une interview façon Gobi, un espace où l'on donne la parole à nos partenaires pour qu’ils nous racontent leur engagement sur le terrain.

 Chaque année, chez Gobi, nous reversons 1% de notre chiffre d’affaires à des associations qui œuvrent pour préserver l’environnement. La Fondation Bordeaux Université en fait partie ! Plus concrètement, nous aidons à financer l’un de leur projet de recherche sur les microplastiques, ces tout petits bouts de plastiques pas mignons du tout qui proviennent de nos déchets et polluent nos océans. 


Ce projet débute forcément par une sortie en mer du navigateur Fabrice Amedeo – actuellement à peine débarqué de la Transat Jacques Vabre – qui collecte les échantillons de microplastiques à examiner. Le co-responsable de l’équipe Ecotoxicologie-Aquatique chargée de ces analyses s’appelle Jérôme Cachot. Professeur en écotoxicologie à l’université de Bordeaux et chercheur au laboratoire EPOC (Université de Bordeaux, CNRS et École Pratique des Hautes Études), il est notre invité du jour.


Dans cette session d’Actions & Vérités, il nous raconte la genèse du projet de recherche, nous partage les premières conclusions et répond à toutes nos questions de citoyens curieux. Nous, on en est sorti impressionnés et doublement motivés.


Bonne lecture !

🕵️‍♀️ Bonjour Jérôme ! Pour commencer, pourrais-tu nous rappeler quels sont les acteurs de ce projet ?

Bonjour Gobi ! C’est tout sauf un travail solitaire – il faut une équipe de professionnels ! A l’université de Bordeaux, deux labos sont impliqués, le CBMN, un laboratoire de chimie et biologie des membranes et nano objets, et l’EPOC, le laboratoire que je dirige et qui est dédié aux micropolluants et à leur toxicité. Nous travaillons aussi avec l’IFREMER, un laboratoire de détection, capteurs et mesures à Brest, et puis avec l’IRD et leur laboratoire d’océanographie physique et spatiale, à Brest également. 

🕵️‍♀️ … et avec le skipper Fabrice Amedeo !

Oui, Fabrice est indispensable. Il était journaliste au Figaro avant de se consacrer pleinement à sa passion de naviguer. Depuis les années 2000, son monocoque est équipé de capteurs : un premier capteur océanographique qui mesure en continue la température et la salinité de la masse d’eau et un deuxième capteur à microplastiques qui filtre en continu l’eau de mer pour retenir les particules plastiques. C’est sa manière de contribuer à la préservation des océans. Toute son activité de skipper est au service de la science et de l’information du grand public, et notamment des enfants.


🕵️‍♀️ On l’applaudit et on lui souhaite des vents favorables ! Quel était votre constat de départ à vous ? Pourquoi cet objet d’étude que sont les microplastiques ?

Pour bien comprendre l’enjeu, il faut resituer le contexte. La production de plastique, qu’elle soit industrielle ou domestique, augmente continuellement depuis les années 50, période de la première commercialisation. 367 millions de tonnes de plastique ont été produites en 2020, ce sont les chiffres de Plastics Europe. Entre 2020 et 2019, grande première sans doute liée à la pandémie, il n’y a pas eu d’augmentation. Mais quoiqu’il en soit, on est très loin de tout trier et recycler… Entre 5 et 10 millions de tonnes par an finissent dans les océans. 

🕵️‍♀️ C’est énorme. Et savez-vous d’où viennent ces plastiques que l’on retrouve dans la mer ?

80% des plastiques dans la mer proviennent des continents, donc de nos activités humaines. Nous utilisons la modélisation des courants océaniques pour définir les masses d’eau, les concentrations moyennes et d’où ces plastiques peuvent provenir précisément. Les pays les plus industrialisés sont des sources majoritaires. 

🕵️‍♀️ Comment est-ce que l’on passe du plastique aux microplastiques ?

Il faut savoir que les plastiques sont extrêmement persistants. Du simple sac plastique au PVC, la durée de vie se situe entre 10 et 1000 ans. J’ai eu la chance d’explorer récemment les fonds marins au large de Nice. Et le malheur de constater qu’à 1000 mètres, on trouve des monceaux de bouteilles plastiques…


Pour répondre à votre question, les plastiques deviennent des microplastiques en vieillissant et en se fragmentant, jusqu’à mesurer entre 5 mm et 1 micron. En dessous de 1 micron, on parle de nanoplastiques. Un micron est invisible à l’œil nu, il faudrait un microscope très performant pour le voir. Ces microplastiques rejetés dans l’environnement se retrouvent dans les estuaires et les zones marines côtières, principalement dans les sédiments et dans les organismes. Les microplastiques sont ingérés par les animaux, du plancton à la baleine, on en trouve dans absolument toutes les espèces !

🕵️‍♀️ On imagine que ce n’est pas anodin. En quoi les microplastiques sont-ils toxiques ?

Le problème n’est pas le polymère, c’est-à-dire le plastique en tant que tel, mais les additifs. Dans un PVC, on en trouve jusqu’à 30%. Cette fuite des additifs s’opère lors du vieillissement du microplastique, vers le milieu dans lequel il se trouve, mais aussi vers l’organisme quand il est ingéré. Nous avons fait des expériences dans le bassin d’Arcachon, en y observant des plastiques pendant 1 an : au bout de 3 mois déjà, beaucoup d’additifs s’étaient libérés. Le problème est que l’on ne connaît pas leur toxicité quand ils se retrouvent mélangés.

🕵️‍♀️ Le fameux effet cocktail… Donc la toxicité est uniquement liée aux additifs ?

Non, n’oublions pas que les plastiques sont aussi de bons supports pour des polluants qui se trouveraient dans l’eau : métaux lourds, pesticides, hydrocarbures, etc. Les plastiques sont des vecteurs de micropolluants, microorganismes, virus… Dont certains sont pathogènes. 

🕵️‍♀️ Brrr. Quels objectifs vous-êtes vous fixés sur ce projet ?

Nous voulons quantifier et cartographier les concentrations moyennes en microplastiques par masse d’eau et les replacer dans le contexte dynamique de la circulation océanique de surface, avec un focus sur la côte atlantique. Si je découpe en étape, cela donne : caractériser les profils de composition des microplastiques pour chaque masse d’eau, caractériser la contamination métallique des microplastiques et évaluer leur toxicité, et enfin communiquer et informer sur la contamination et l’impact des microplastiques dans les écosystèmes marins.

🕵️‍♀️ Communiquer et informer, c’est ce que vous êtes en train de faire ! Pour revenir au début : à quoi ressemble le dispositif de prélèvement des échantillons ?

Il s’agit d’une filtration en continu. Fabrice a sur son bateau une pompe au niveau de la quille, à 3m de profondeur, qui fait passer l’eau de mer à travers une colonne de 3 tamis différents, à 30, 100 et 300 microns. Bien-sûr, ce système permet de capter essentiellement les microplastiques plus légers. L’analyse serait différente si l’on observait les profondeurs. Les déchets du BTP, le PVC, les tuyaux, etc. sont des plastiques lourds qui sédimentent au lieu de flotter. 

🕵️‍♀️ Chez Gobi, nous suivons l’aventure depuis l’an dernier, avec la collecte de microplastiques lors du Vendée Globe. L’initiative avait été très largement relayée par les médias ! Quel en est le retour d’expérience ?

Déjà, c’était super de pouvoir exploiter des échantillons provenant d’un itinéraire très peu fréquenté par les bateaux scientifiques. Fabrice n’a pas pu aller au bout de la course en raison d’avaries informatiques, mais il nous a tout de même ramenés 53 échantillons d’eau venant des côtes d’Amérique du Sud et d’Afrique. Nous en avons tiré quelques premières conclusions dont je n’ai pas encore le droit de vous dévoiler la teneur exacte. Je peux vous dire que nous avons identifié 100 microplastiques différents et plus du double de fibres de cellulose. 

🕵️‍♀️ D’où vient cette grande quantité de cellulose ?

C’est plus simple qu’on ne le pense : la cellulose vient du lavage des vêtements. La quantité de fibres perdue à chaque lavage est énorme… Nos machines à laver ne filtrent que les fibres les plus grosses, et les stations d’épuration ne retiennent pas les fibres en dessous de 100 microns. D’où l’intérêt de limiter les lessives, mais aussi de privilégier la seconde main. En effet, l’essentiel des fibres part lors du premier lavage d’un vêtement neuf. 

🕵️‍♀️ Voilà qui apporte de l’eau à notre moulin, vive la seconde main ! Concernant nos habitudes au quotidien, une autre question : peut-on encore manger du poisson ou des fruits de mer l’esprit serein ?

Alors, les microplastiques dont la taille est supérieure à 1 ou 2 microns restent dans le tube digestif du poisson et ne viennent donc pas contaminer la chair. En revanche, les additifs peuvent éventuellement passer, tout comme tous les microplastiques plus petits. En bref, je dirais qu’on a une chance sur deux de croquer un microplastique en mangeant une huître. 

🕵️‍♀️ Miam… Et comment s’annonce la suite du projet ?

Le processus de caractérisation et l’analyse de la toxicité sont encore en cours, il nous faut récolter encore plus d’échantillons. C’est ce que Fabrice est en train de faire ! Nous voulons aussi inclure 50 prélèvements effectués lors du Tour de France à la voile, où Fabrice a navigué toutes les côtes françaises ainsi que l’estuaire du Rhône, de la Gironde, de la Seine et de la Loire. 

🕵️‍♀️ Gobi va suivre ça de près ! En attendant, quelles sont les bonnes pratiques que l’on peut déjà mettre en place pour réduire la pollution aux microplastiques ?

Limiter le jetable ! En mer, la collecte est impossible et la pollution se diffuse sur des étendues énormes. Et bien-sûr limiter la pollution à la source, en optant pour des plastiques réutilisables, dont on connaît la composition. Le manque de transparence est toujours une excellente raison d’écarter une marque ou un produit. 

🕵️‍♀️ C’est exactement notre démarche chez Gobi ! Merci beaucoup Jérôme, et à très bientôt pour nous partager les résultats du projet.  

Pour aller plus loin

éco-conceptionBon à savoir sur le plastique chez Gobi :

  • Un copolyester nouvelle génération a été choisi à l’issue d’un processus d’ éco-conception comme étant le meilleur matériau pour les gourdes Gobi Original et Gobi Street.
  • Nous avons travaillé avec une chercheuse spécialisée dans les enjeux sanitaires des matériaux pour établir une blacklist très conséquente que l’on soumet à tous nos fournisseurs et qu’ils s’engagent à respecter.
  • Nos tests de migration dépassent de très loin les exigences de la réglementation européenne. Nous avons même simulé le vieillissement pour être sûr que nos gourdes tiennent la route et restent sans aucun danger pendant toute une vie.
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